Boschère Jean de – Véronique de Sienne

Boschère Jean de – Véronique de Sienne: Pierre Bioulx d’Ardennes, vieux mondain dissident, et Macrube, universitaire affiné mais renégat, se sont rencontrés chez Lady Joan en Angleterre et, dès leur première rencontre, ils apprirent à se connaître. Macrube y accompagne son fils Léon et c’est là que Pierre rencontre Virginie qu’il courtise et abandonne.
Enfin, à Sienne, où se retrouvent Lady Joan et sa suite, Pierre croise une jeune femme dont il tombe immédiatement fou amoureux. Il l’appelle Véronique. Mais qui est Véronique ?

Après Marthe et l’enragé puis Satan l’obscur, ce troisième volume, Véronique de Sienne sera-t-il celui de la rédemption de Pierre Bioulx d’Ardennes ? Dans Satan l’obscur, ce double obscur de Boschère (Bounoure, 1938) détruit le cœur et la vie de Douce comme celle sa fille Fryne dans la vengeance infernale, d’un homme corrompu par les défaites de ses luttes impossibles. Dans les débuts de l’histoire – et dans les salons britanniques que Boschère dépeint avec une causticité réjouissante – Pierre, reste fidèle à lui-même : Don Juan vieillissant, sarcastique et méprisant mais amer et désolé, tenté par le suicide (Lebois, 1956). Ses discussions avec Macrube (incarnation de Milosz) ouvrent une fenêtre de mysticisme, fenêtre vite refermée. Le conflit du fils de Macrube, la tempête dans la Manche – un véritable morceau de bravoure (Lebois, 1956) – le suicide de Macrube dans un verger de Sienne, repositionnent les dilemmes de Pierre Bioulx.

Cependant à Sienne, dans cette deuxième partie qui est au niveau de ses meilleurs écrits, Jean de Boschère et son double éprouvent des ions : celle de l’Italie, d’abord, qu’il découvrit avec Lady Elisabeth d’Ennetières (Desbruères, 1999)¸ ce « Pays du Merle bleu, où j’ai vécu avec le soleil, les fleurs et les oiseaux, que cela me fut révélé. » (Les Paons et autres merveilles), comme pour Sienne où « … la nuit étant complètement assise sur la ville, les pinceaux de la lune entrèrent par toutes les issues et jusqu’au fond des caves, où dans un rectangle bleu ils dessinaient en noir les grillages du soupirail. Pourquoi de telles nuits italiennes nous portent-elles à rendre un hommage d’amour à Shakespeare, toujours ? »

ion encore pour une jeune papetière que Pierre croise dans la rue :  « Cette rencontre avait lieu dans des mondes dont j’avais jusqu’alors tout ignoré. Ce n’était pas seulement la beauté jamais imaginée de la jeune fille qui me troublait à en perdre tout contrôle de mes pas. Elle était excessivement jeune, je craignais même d’être trop sûr qu’elle était à peine une femme [et, en y repensant] Voici, à quarante ans, le grand événement. L’amour est entré dans son cœur avec la force d’un ange et la cruauté d’un meurtrier. »

L’histoire va-t-elle recommencer ? Pierre le craint et apostrophe la divinité : « Au moins une fois, ô mon Dieu, ne faites pas un crime de ma rencontre de ce que Vous-même avez permis au merveilleux. Donnez-moi la force que nul n’eut jusqu’ici. » Alors : « … je prononçai un nom. D’où venait que je dis nettement Véronique ? La tête d’ange sous le voile que lui avait imprimé les siècles, […] cela avait-il créé une muette, mais indomptable communion entre ces figures voilées et le souvenir du linge sacré de sainte Véronique ? » Le nom de cette sainte à la figure révélatrice pour Pierre, en appelle un autre auquel le titre de l’ouvrage fait résonnance : Catherine de Sienne.

Cette moniale voyageuse traitée de mulier girovaga dont la quête mystique initia un nouveau modèle de spiritualité confirme la recherche mystique de Boschère mise en scène dans ce roman, recherche que l’on retrouve, un peu plus tard, dans les fragments de journal intime que sont les quatre numéros de sa revue Mouche à Miel, et dans les recueils Élan d’Ivresse, Dressé actif, j’attends ! ou enfin, en prémisses, dans L’Obscur à Paris (Lebois, 1954). Celle qui, vers la fin de sa vie, à la Châtre, l’amena à se créer une position originale quasi ascétique et, en quelque sorte, un Dieu pour lui seul. (id.)

Quelle révélation le dénouement du roman pourrait-il le faire penser ? Ou Satan aura-t-il raison ?

(Ghysen, Francine. Redécouvrir Jean de Boschère, poète-imagier rare : Le Carnet et les Instants, Le blog des Lettres belges francophones, 1917 ; Lebois, André.   Présentation des Contes de la neige et de la nuit : L’Amitié par le Livre, 1954 ; Desbruères, Michel. Préface de Véronique de Sienne, Paris : E.L.A. La Différence, pp. 7-12,1999 ; Lebois, André. Commentaire in Quo Vadis, 1956 cité in Véronique de Sienne, id., pp. 269-272 ; Gabriel Bounoure in Mouche à Miel, Paris : Les Presses du Hibou/Denoël, décembre 1937-39 ; Wikipedia ; Encyclopedia Universalis.)

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